Quand la Coupe déborde, et avec elle, notre tolérance

Publié le 05/05/2025

Quand la Coupe déborde, et avec elle, notre tolérance

Ce dimanche, Bruxelles aurait dû vibrer au rythme d’une grande fête populaire : la finale de la Coupe de Belgique (Croky Cup). Mais au lieu des chants de supporters, la capitale a été secouée par les cris, les sirènes, les émeutes. Ce qui devait être un moment de communion autour du football est devenu une scène de chaos urbain. Une fois de plus…

La finale entre le Club de Bruges et Anderlecht n’a pas seulement opposé deux clubs rivaux. Elle a été le théâtre d’une explosion de violence organisée, préméditée, d’une intensité inédite. Ce ne sont plus de simples débordements, ce sont des scènes de guerre : 63 interpellations, 80 blessés, des affrontements en plein centre-ville, dans des quartiers comme Molenbeek ou Jette, des magasins vandalisés, des passants agressés, des touristes apeurés, contraints de fuir.

Des deux côtés, des supporters ont sombré dans la haine. Mais certains groupes, notamment des hooligans d’extrême droite venus de Bruges, ont franchi un cap : cagoulés, armés de battes ou d’armes de poing, ils ont ciblé délibérément des commerçants, des familles, des jeunes. Des actes racistes et islamophobes ont été constatés. Il ne s’agissait plus de soutenir un club. Il s’agissait de blesser, d’humilier, de dominer par la peur.

"Il ne s’agissait plus de soutenir un club. Il s’agissait de blesser, d’humilier, de dominer par la peur."

Dans le métro, sur les places, dans les rues, la violence s’est imposée. Des supporters d’Anderlecht ont eux aussi traqué des adversaires dans le métro, semant la terreur. Ces scènes ne sont pas anodines. Elles ne peuvent plus être excusées, ni réduites à une « rivalité » malheureuse entre fans.

Cette violence s’organise. Elle se prépare, elle s’ancre. Et il est temps de cesser de détourner le regard.

Une responsabilité collective !

Elle incombe d’abord aux clubs, qui doivent surveiller et exclure leurs groupes ultras les plus violents. À la Pro League, qui condamne mollement mais tarde à prévenir. À la Fédération belge de football, enfin, qui persiste à organiser des matchs à haut risque dans des infrastructures inadaptées comme le Stade Roi Baudouin, un site vétuste, mal sécurisé, enclavé dans un quartier dense où toute tentative d’isolement devient impossible.

Comment expliquer qu’à chaque match sensible, les mêmes scènes se répètent ? Que des groupes identifiés puissent opérer en toute impunité, terroriser des quartiers entiers, frapper des innocents ? Pourquoi ces groupes ne sont-ils pas dissous ? Pourquoi leurs membres ne sont-ils pas interdits de stade – pour de bon ?

Et surtout : que fait-on pour sécuriser l’espace public autour des matchs ? Pas uniquement les tribunes. Les rues. Les stations. Les commerces. Les vies. Faut-il attendre la prochaine émeute pour, une fois encore, déplorer, constater… puis oublier ?

Il ne suffit plus de « condamner fermement ».

Nous aimons le football. Pour sa ferveur, son intensité, sa puissance rassembleuse. Mais cette passion, lorsqu’elle devient haine, lorsqu’elle fracture la société, lorsqu’elle répand la peur… alors ce n’est plus une passion. C’est une pathologie.

Il ne suffit plus de « condamner fermement ». Il faut agir. Expulser les fauteurs de troubles. Réformer les lois. Protéger les habitants. Repenser l’organisation des grands événements. En finir avec la complaisance. La Belgique mérite mieux qu’un football otage de la violence. Elle mérite un football à la hauteur de ses valeurs.